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  • : Le Massacre
  • : " On a qu'à appeler ça Le Massacre alors. " Mickaël Zielinski, Nicolas Lozzi, mai 2009.
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29 novembre 2010 1 29 /11 /novembre /2010 13:45

 

 

Technique ♦♦

Esthétique

Emotion ♦♦

Intellect 

 

 

 

Sans surprise aucune, malgré un froid dévorant et une faim tenace, nous cédâmes aux sirènes du marketing infâme et à notre amour rowlingien pour nous diriger, les bras ouverts et le coeur en cadeau, vers le volet fraîchement sorti au cinoch des aventures de Harry Potter. Je ne peux manquer d'assombrir ce texte d'une oraison funèbre, car je viens d'apprendre la mort de Leslie Nielsen, et le monde artistique n'avait pas perdu de plus illustre ambassadeur depuis au moins, disons, William Shakespeare. Mais cela reste parfaitement raccord avec la chronique puisque, septième épisode oblige – la maturité et la sombritude allant toujours croissant chez le petit sorcier binoclard – le film de Yates est désespérément tragique et mélancolique.

 

Je ressentais néanmoins un a-priori positif au sujet de cette énième transcription des romans à succès de J. K., et j'ai eu raison puisque sans grande lutte possible, ce septième Harry Pot' partie 1 est le plus réussi de tous, à l'exception notable de l'intouchable numéro 3 de Cuaron (Le Prisonnier d'Azkhaban). Pour être plus précis, sont rassemblées toutes les promesses entrevues dans le précédent (après néanmoins un 4 et un 5 complètement foireux), à savoir une vraie mise en scène, une esthétique pas dégueu et des acteurs en progrès, avec en sus des défauts gommés par miracle. La scission en deux parties des Reliques de la mort est indéniablement un coup marketing, mais voilà une preuve éclatante que les retombées peuvent en être positives : ainsi rallongé du double de la durée prévue, voilà la trame narrative qui prend le temps de respirer, des scènes longues qui conséquemment deviennent prenantes, des passages "inutiles" pour la diégèse mais qui renforcent l'opacité, le rythme et la maturité du métrage. Prenons simplement cette succession de scènes au beau milieu du film qui voient Harry et Hermione, solitaires et paumés au milieu de la nature grand-bretonne aux décors splendides, qui ne font rien de spécial et prennent même le temps, en toute fraternité, de danser dans leur tente glaciale – un des plus beaux moments vus dans tous les Harry Potter confondus, tout simplement. Prenons encore la très jolie exposition du film, qui survient après un plan inaugural par ailleurs moche et sans intérêt (énorme plan sur les yeux du ministre de la magie...) : montage alterné des "départs" des trois personnages principaux ; Harry revisite la chambre miteuse sous l'escalier qui lui servit d'abri de jeunesse, tandis que les Dudley déménagent ; Ron s'inquiète dans la fraîcheur du soir à l'extérieur de sa maison biscornue ; Hermione enfin (devenue subitement le personnage le plus passionnant de tous, par la grâce d'une actrice surgie de son cocon) provoque l'amnésie de ses parents tandis que son image s'efface des photos de famille. Voilà une utilisation filmique de la magie qui est belle, intelligente et sensée.

 

 

Luna ou le meilleur personnage de Harry Potter toutes compétitions confondues (du moins dans la version ciné).

 

 

Les passages obligés (d'action, d'explication, d'émotion) se succèdent sans trop nous emmerder et pour faire avancer l'intrigue, et on ne pouvait pas vraiment en attendre mieux. Par contre, quelques plans en début de film (ceux montrant Rogue/Snape) sont vraiment beaucoup trop sombres, et on ne comprend rien à ce qui s'y passe. Il y a aussi une curieuse et malvenue obsession de Yates pour les fondus au noir, qui interviennent parfois sans logique aucune comme lors de la scène du mariage où Harry discute avec un vieux sorcier. Enfin, la principale faiblesse du film réside dans le texte adapté au départ : ce septième volet m'avait fort déplu à l'époque où je l'ai lu, tout engoncé qu'il était d'un appareil fantasy qui nous renvoyait cinq volumes en arrière, d'un brusque recul dans la maturité, d'une intrigue surchargée d'objets magiques lourdingues alors qu'un fil narratif plus construit et plus adulte nous tendait les bras (en plus, c'était franchement mal écrit et parfois à la limite de l'incohérence). Il est palpable que Yates a senti la faiblesse des Reliques de la mort à la base, et a compris l'intérêt de couper ce qu'il fallait pour aménager en lieu et place un scénario plus "cinématographique", profiter de tout ce temps de pellicule disponible pour construire une mise en scène plus ambitieuse. C'est très réussi.

 

Techniquement, les effets spéciaux sont plutôt bien intégrés, les luminosités on l'a vu sont parfois exagérément sombres, mais les scènes en extérieur sont superbes, et les moments forts assez réussis, ce qui était également un énorme défaut du 6 (voir chronique). Le juste jeu des acteurs (enfin !) notamment des trois principaux, est aussi pour beaucoup dans le brusque accès de crédibilité dont jouit le film, qui ne se départit pourtant pas d'un humour par petites touches sensibles et de vraies idées de mise en scène, à l'image des combats à la baguette qui ressemblent de plus en plus (par les bruitages, les cadrages) à des fusillades, évoquant ainsi un danger de plus en plus réel, de moins en moins étriqué dans le "risque" relatif du conte pour enfants. Et pourtant, on tient la grande scène féerique qui manquait un peu à la série : c'est celle où Harry suit dans les bois le patronus d'une biche qui le mène jusqu'à une épée légendaire emprisonnée dans un étang gelé. Conte, légende arthurienne, quête initiatique, tout est contenu dans ce moment. Rowling n'avait franchement pas besoin d'en faire plus que cela dans la symbolique fétichiste pendant tout le roman. Concluons sobrement et paraphrasons tous les journaux : on attend impatiemment la conclusion.

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