Avec toutes mes excuses pour le léger retard qui porte en février 2011 ce top culturel du deuxième semestre de 2010 (...) voici sans plus attendre les résultats du scrutin. Nous fûmes nombreux à voter, enfin au moins moi, et c'est cette fois trois podiums pour trois supports qui constitueront les indispensables acquisitions destinées à délester votre porte-monnaie pour les mois à venir. Sans plus attendre voici le...

Top livres

3) Des nouvelles du Tibbar – Thimotée Rey

Gloire aux Moutons éléctriques pour avoir publié ce formidable recueil de fantasy intraçable, drôle et maline. Inventivité de chaque instant, bonne maîtrise technique, humour omniprésent : un vrai plaisir.

2) La Fin des Temps – Haruki Murakami

Veuillez me pardonner : ce livre n'a pas été chroniqué en ces pages puisqu'il faisait partie de l'importante documentation sur le Japon que j'ai potassée en vue de la parution prochaine du Yellow Submarine en gestation. Et ça m'a laissé sur le cul, je dois dire : incroyable exercice transfictionnel à l'écriture splendide, à la frontière entre cyberpunk futé et fantasy onirique.

1) Le Voyage de Spivet – Reif Larsen

Un des plus beaux romans que j'ai jamais lu, coup d'essai et coup de maître pour l'Américain Larsen. À l'utilisation étonnante de la mise en page répond une belle histoire initiatique bourrée d'idées narratives novatrices. Si vous voulez en savoir plus, vous n'avez plus qu'à parcourir la revue Fiction, dans laquelle j'ai tartiné des pages entières sur cet étrange volume.

Top films

3) Inception – Christopher Nolan

J'aurais pu choisir La Classe Américaine ou 28 jours plus tard pour cette troisième place, derrière un duo qui ne souffrait aucune comparaison. J'ai fait le pari de l'audace : sur un scénario original de science-fiction à l'idée brillante, Nolan applique un montage hallucinant et illustre un défi psychologique intense, souffrant néanmoins de quelques scènes d'action superflues. Le grand film de SF de ces dernières années, nous le tenons enfin.

2) Kill Bill (diptyque) – Quentin Tarantino

Et à présent, récompensons le travail bien fait, en attribuant la deuxième place à cette oeuvre formidable en deux volets, dans laquelle Tarantino place le plaisir cinématographique au centre de tout, avant de balayer consciencieusement toutes les conventions établies.

1) West Side Story – Robert Wise

Et à la place suprême, une vieillerie resplendissante, fabuleux numéro visuel et sonore, avec une mise en scène et une colorisation d'une rare beauté. Vous trouvez ça mièvre ? M'en fous.

Top BD

3) Macanudo – Liniers

Dans la mesure où les deux premières places se disputent déjà un lien fondamental avec le Japon, et que mon année 2010 a été pour le moins japonaise, je ménage un peu d'éloignement à l'insularité pour cette troisième place du podium. Néanmoins ne nous y trompons pas : Macanudo (deux volumes d'ailleurs) est une merveilleuse collection de strips très soignés dus aux crayons fins et délicats de l'Argentin Liniers. Des "gags" souvent pas drôle mais qui nous plongent dans le non-sense, l'absurde, l'onirisme.

2) Manabe Shima – Florent Chavouet

Un coup de coeur tout à fait personnel depuis sa parution. Chavouet a réussi à faire, sur la petite île japonaise de Manabe Shima, encore mieux que ce qu'il avait déjà fait, en ville, pour Tokyo Sanpo : des chroniques en pleines planches, aux pastels chatoyants, explosant la mise en page en un bordel très rigoureux. D'une beauté drôlatique, ce "carnet de voyage séquentiel" est une idée géniale parfaitement réalisée.

1) L'île panorama – Edogawa Ranpo

Je peux vous dire que ce Top 3 BD a été de loin le plus difficile à établir. Beaucoup de bandes dessinées auraient pu prétendre au podium voire à la première place, aussi a-t-il fallu que j'établisse certains critères, après avoir retenu une vingtaine de titres : d'abord, ne pas récompenser de BD déjà primée, notamment à Angoulême (exit donc le très audacieux Asterios Polyp de Mazzuchielli [qui, en plus, se paye le luxe d'avoir un second titre dans ma sélection restreinte : le très bon Batman year one], ainsi que le Pluto de Urasawa qui, disons-le tout net, aurait sinon remporté la mise) ; ensuite, ne pas surcharger un bassin géographique (beaucoup de manga dans le dernier round : il fallu éliminer par exemple Mon vieux [du reste la répartition est réussie puisqu'on se retrouve sur le podium avec un Argentin, un Français et un Japonais]) ; aussi, privilégier des artistes complets, qui ont prouvé que leur qualité allait au-delà d'un album ou d'une série en particulier (ce fut fatal, notamment, à Blain pour son Quai d'Orsay, à Kick Ass, ou encore au Pour l'empire de Merwan et Vivès) ; enfin, essayer autant que possible d'éviter les vieilleries (adieu Tezuka) et les auteurs déjà archi-connus dans nos contrées, sinon ça ne sert à rien (ainsi de Trondheim, pour Bludzee et Omni-visibilis). Restait un panel tout à fait éclectique, composé notamment des deux oeuvres précédentes, mais aussi L'Asile d'Arkham par Dave McKean, le Rayon de la mort de Daniel Clowes, le Green Manor de Vehlmann... et L'île panorama. Là, mon sang ne fait qu'un tour : mais bien sûr, me dis-je, L'île panorama, cette sublime fresque de science-fiction puisant son matériau dans l'oeuvre d'Edgar Alan Poe, avec la narration tellement brillante du génial Edogawa Ranpo, voilà bien la BD qui m'a donné le plus de plaisir, m'a montré le plus de maîtrise, m'a abasourdi par ses trouvailles. Et en plus, c'est chez les gens géniaux et très gentils du Lézard Noir, petite boîte pleine de bonnes choses. Il n'y a plus à hésiter. C'est mon dernier mot.