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  • : " On a qu'à appeler ça Le Massacre alors. " Mickaël Zielinski, Nicolas Lozzi, mai 2009.
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22 juillet 2010 4 22 /07 /juillet /2010 15:17

 

Technique ♦♦

Esthétique

Emotion

Intellect  ♦♦

 

 

Il y a quelques années, je revoyais le Jurassic Park de Steven Spielberg (encore un film que j'ai énormément regardé étant jeune) et me faisais la réflexion que l'aspect primordial de ce film réside dans le fait que le merchandising "réel" qui a entouré sa sortie était déjà inclus dans le film lui-même, ouvrant la voie à la nouvelle génération des blockbusters (déjà lancés par Spielberg auparavant et dont la première pelletée a sans doute correspondu aux Dents de la mer). En substance, le discours de Jurassic Park était clair et dual : prolonger le spectacle par un commerce supérieur en importance (celui des produits dérivés en l'occurrence), c'est dénaturer ou altérer ce spectacle, déplacer l'intérêt du spectateur vers autre chose que l'oeuvre en elle-même (par extension, vers ses effets spéciaux par exemple). Toy Story 2, que j'ai téléchargé dans la plus parfaite illégalité pour me préparer à une visite dominicale au cinoch du coin qui diffusera le troisième volet, raconte finalement la même chose, de façon encore plus frontale.

 

Il est très habituel pour les studios Pixar de ménager dans chacun de leurs films un niveau de lecture inattendu qui renvoie à leur histoire, leur actualité et leur situation. Ratatouille par exemple (leur chef d'oeuvre à mon sens) travestissait de manière limpide leur rachat par Disney et le jeu de lutte et d'influence politique que cela a impliqué ; Wall-e, dans son générique final, annonçait le dessin animé moderne (numérique) comme la forme d'art le plus aboutie. Eh bien on retrouve une lecture similaire dans Toy Story 2, qui était pourtant à peine leur troisième long-métrage (le second ayant été 1001 pattes, qui est explicitement cité dans cet épisode !). Toy Story 2 est le récit de la folie qui s'empare du monde à l'égard du film d'animation numérique. La bonne idée du premier volet résidait déjà dans le choix des jouets – des objets de divertissement inanimés – pour devenir les héros du premier long-métrage d'animation entièrement numérique – autrement dit un procédé qui peut animer "l'inanimable" au seul moyen de la technologie. Cette suite est, dans son propos, entièrement logique : la question suivante était de savoir quelle pouvait être la réaction des héros lorsqu'ils sont confrontés à leurs alter-ego infiniment reproductibles. Ainsi, l'intrigue principale de Toy Story 2 consiste à amener Woody, Buzz et leurs acolytes, dans un gigantesque magasin de jouets qui contient leurs avatars industriels (le mur tapissé de Buzz l'éclair, autant d'individualités pourtant semblables) ou au contraire leur univers référentiel (ainsi Woody prend conscience qu'il est le personnage principal d'un "univers western" décliné en une foule de produits de collection).

 

 

Il faut bien deux paires d'yeux solides pour découvrir l'arrière-train de Monsieur Patate.

 

 

Toy Story 2 relate ainsi une véritable crise artistique des studios Pixar : leur talent, leur art narratif subtil et précis, ne sont-ils voués qu'à la reproduction stérile et industrielle, leurs personnages ne sont-ils que capitalisation de l'espace publicitaire ? Oui, et ils en sont à la fois conscients, enthousiastes, inquiets et impuissants. Ils ont la nostalgie de ces divertissements populaires qui étaient adorés du public et pouvaient faire l'objet d'un véritable culte (c'est le cas de ces produits vieillots et classieux qui constituent l'univers western de Woody) mais estiment également que les moyens énormes dont ils disposent peuvent également leur permettre d'affiner leurs oeuvres et de faire les dessins animés les plus réussis qui soient (c'est le personnage de Buzz qui vient au secours de Woody). À la fin, les univers "moderne" et "classique" sont réunis et destinés à se mélanger (Buzz et la petite cow-girl s'échangent des répliques éloquentes à la toute fin) pour produire la meilleure soupe : à la fois dynamique et raffinée. C'est la même histoire pour la cuisine de Ratatouille. Pixar se veut être la réconciliation du classique et du moderne dans l'art, une synthèse éblouissante des tendances et des publics.

 

Hélas, en ce qui concerne ce deuxième volet de Toy Story, il aurait fallu veiller à la tenue cinématographique de l'oeuvre. Or, très courte, mal rythmée et surtout très mal montée, bourrée de références à Star Wars (mais aussi, d'ailleurs, à ... Jurassic Park) mais oubliant les surprises et innovations de mise en scène du premier opus, elle n'accouche que d'un petit film dont le résultat n'est pas à la hauteur du projet. En attendant, dix ans plus tard, une apothéose ? Nous verrons cela dans quelques temps.

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