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  • : Le Massacre
  • : " On a qu'à appeler ça Le Massacre alors. " Mickaël Zielinski, Nicolas Lozzi, mai 2009.
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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 20:25

http://braindamaged.fr/wp-content/uploads/2013/10/le-vent-se-leve-affiche-du-dernier-hayao-miyazaki-affiche.jpg

 

 

Technique  

Esthétique  

Emotion  

Intellect   

 

 

Ma chronique a beaucoup de retard ; j'ai vu ce film il y a maintenant quinze jours. Ma douce et moi sommes bien sûr allés le voir dès sa sortie en salles. Peu de cinéastes nous font déplacer ainsi, en urgence de plaisir ; Miyazaki en est. Il est même le roi du plaisir urgent. J'avoue pourtant avoir laissé traîner, tout simplement parce que j'ai un peu de mal à savoir comment aborder Le Vent se lève (aucun rapport avec la très chiante Palme d'or de Ken Loach au passage). C'est l'émotionnel qui reste de ce film, de prime abord. Et j'ai réellement du mal à développer un discours critique intéressant sur une oeuvre qui a avant tout été un dialogue. J'aurais tendance à mépriser l'idée que je vais énoncer, mais là je dois reconnaître que c'est un cas d'école : il y a des oeuvres qui ne révèleront leur génie que lorsqu'on connaît bien le corpus de l'auteur. Clairement, si vous n'avez jamais vu un Miyazaki et n'en avez rien à foutre, il y a peu de chance pour que vous voyiez l'intérêt de ce film, qui est si manifestement autobiographique et testamentaire que toutes ses autres qualités (pourtant nombreuses) s'en voient occultées.

 

 

 

http://a69.g.akamai.net/n/69/10688/v1/img5.allocine.fr/acmedia/medias/nmedia/19/00/17/49/20627518.jpg

 

L'inévitable parapluie.

 

 

Le Vent se lève est un biopic sur un jeune ingénieur aéronautique talentueux qui a conçu les avions de chasse Zéro pour l'armée japonaise pendant la Seconde Guerre Mondiale. Toute ressemblance avec l'histoire du père de Hayao est éventuellement pas du tout fortuite (je vous renvoie à sa page wikipedia, je vais pas tout vous expliquer non plus). Le personnage du film accumule néanmoins les ressemblances frappantes avec Hayao lui-même : cette évocation de sa très mauvaise vue dans son enfance, qui semble le condamner à ne pas réaliser son rêve professionnel ; son habileté au dessin (technique dans son cas, artistique certes dans le cas de Miyazaki) ; sa propension à la rêverie steampunk traversée de vaisseaux fabuleux ; sa volonté de se rapprocher de son modèle (un ingénieur italien dont je ne sais plus le nom d'un côté, peut-être Paul Grimault, ou Walt Disney, ou Tezuka de l'autre ?) ; sa détermination, enfin, et sa subordination totale à son art, même s'il alimente des commanditaires inavouables (l'armée dans un cas, peut-être Disney dans l'autre ? ou tout simplement le business/marketing).

 

 

 

http://4.bp.blogspot.com/-upP4gLM8SrQ/Um7e-pMFABI/AAAAAAAAC2Q/tWPdIyzJ55Q/s1600/le-vent-se-leve-miyazaki-5.jpg

 

 

 

Ajoutez à cela que le film est assez lent, peu spectaculaire, bourré d'ellipses et de non-dits, du coup très solicitant pour le spectateur qui doit sans arrêt boucher des trous temporels et comportementaux avec logique ou intuition, et vous comprendrez que Le Vent se lève n'a rien d'immédiat, qu'il n'emportera pas l'adhésion de tous les publics comme un Voyage de Chihiro par exemple. Pour autant, c'est un film d'une qualité technique proprement hallucinante. Le découpage des scènes est aussi limpide que sophistiqué ; on retrouve certes une manière de mettre en scène longuement mûrie dans le style Ghibli, notamment pour qui a déjà vu les films les plus "adultes" du studio (je pense par exemple à La Colline aux coquelicots du fiston). Mais il y a cette fois une dimension supplémentaire, une maturité ou plutôt une liberté, de ralentir la narration, user d'une mise en scène plus cinématographique,  surprendre avec des inclusions oniriques inattendues, bref en quelque sorte d'instiller tranquillement du Miyazaki dans une imagerie plus "Takahata" (Le Tombeau des lucioles). Le réalisme historique de l'histoire y contribue.

 

 

 

http://www.kanpai.fr/wp-content/uploads/2013/11/le-vent-se-leve-vol.jpg

 

 

 

Esthétiquement, c'est tout aussi bluffant. Des phares balayent les pavés de Berlin, le calme paysage japonais rural est secoué par les bourrasques, les machines volantes fendent le ciel, et pour ne rien gâcher l'animation est d'une fluidité comme rarement j'en ai vu dans un film d'animation. Bref, la perfection technique est doublée d'un goût délicat pour tout ce qui concerne couleurs et textures. Et puis c'est émouvant. Et intelligent. Et le plus terrible, lorsque le film s'achève, c'est qu'on sort de la salle avec la certitude qu'on vient bel et bien de voir le dernier Miyazaki. Il faut vivre une séance pour en être convaincu. On sait que plus jamais on ne vivra l'excitation d'une nouveauté, d'un plaisir certain, en anticipant la date de sortie française. C'est triste. Mais d'un autre côté, on pose un regard attendri sur les quinze dernières années, et l'on peut se féliciter d'avoir connu la sortie en salles de Mononoke, de Chihiro, les redécouvertes ébahies de Totoro, Kiki, Nausicaa et Laputa. Nous, petits trentenaires élevés au grain du Japon, avons connu ça. Putain de chanceux.

 

 

http://www.cineaddict.fr/wp-content/uploads/2013/11/Le-Vent-se-leve-.jpg

 

 

 

Sayonara.

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